Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/72

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sardine. Le señor Rosales, ses filles, ses hôtes, ses serviteurs ne sont point atteints de surdité.

— Je vous le concède…

— Eh bien, alors ?…

— Leurs oreilles ne percevront aucune détonation… une petite invention de votre serviteur.

Du coup la curiosité de Scipion fut très excitée :

— Et ce moyen ? interrogea-t-il.

— Je vous l’enseignerai dans un instant.

— Pourquoi pas de suite ?

— Parce que l’heure n’est pas venue. Mais rassurez-vous, señor Massiliague, elle n’est plus éloignée.

Les deux personnages s’engageaient sous les premiers arbres du bois. Quelques pas encore, et les buissons de la lisière les cachèrent. Si quelque peone avait traversé les cultures de la plaine, il n’eût pu deviner la présence des promeneurs.

— Tenez, s’écria soudain Sullivan, je ne veux pas vous taquiner plus longtemps. Je vais vous confier mon procédé.

— Voilà qui est bien, fit joyeusement Scipion. Ma trompe d’Eustache, elle est ouverte au large.

Une grimace énigmatique crispa les lèvres du Yankee.

— Oh ! c’est l’œuf de Christophe Colomb. Quand je vous aurai conté la chose, elle ne vous paraîtra peut-être pas intéressante. Je vous répondrai néanmoins : il fallait la trouver.

— Je le reconnais, mais parlez.

— Ainsi fais-je.

Et exécutant les mouvements à mesure qu’il parlait, Joë prononça lentement :

— Je coupe cette petite branche. Je la prends dans ma main droite… J’étends le bras… je décris trois cercles dans l’air, et je dis : Allez !

L’ultime syllabe vibrait encore quand plusieurs hommes, au costume de chasseurs des prairies, bondirent hors des buissons environnants.

Avant que Massiliague ahuri eût esquissé un geste, il était saisi, ligoté et un bâillon épais s’appliquait sur sa bouche.

Alors Sullivan s’inclina gravement :

— Le tour est joué, señor. Les habitants de l’hacienda ne percevront aucun coup de feu.

Après quoi, le Yankee, s’adressant à ses subordonnés, lança ce commandement bref :