Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/8

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ment le droit des États-Unis à empêcher une chose… juste.

— Une chose juste, gronda son interlocuteur avec un mouvement brusque qui fit cliqueter les lourdes breloques de sa chaîne de montre, une chose juste… Comment osez-vous qualifier ainsi une détestable, une diabolique opération ?

— J’ose, parce que, nous autres Canadiens, avons l’habitude d’exprimer loyalement notre pensée.

— Voudriez-vous rompre nos conventions ?

Le chasseur secoua la tête :

— Ne craignez pas cela, monsieur Sullivan. Le Grand-Esprit, comme disent les Peaux-Rouges, a permis que je vous donne ma parole… il adviendra de notre entreprise ce qui est écrit au livre de la Destinée. Quel que soit l’avenir, vous pouvez compter sur moi et sur Pierre.

— On combat mal quand on doute de son droit.

— On se bat bien, quand la bataille est un devoir… Or, c’est un devoir de faire honneur à ses promesses. Vous êtes venu me trouver à ma maison, au bord du lac Ontario, vous m’avez dit : Francis Gairon, veux-tu faire campagne avec moi. Il y a deux mille dollars pour toi et ton engagé. Je vous ai répondu : Marché conclu. Donc, il n’y a plus à revenir là-dessus. Mais ce posé, rien ne m’empêche d’ouvrir mon cœur[1].

Sullivan eut un sourire aussitôt réprimé :

— Ouvrez votre cœur, mon digne Francis, ouvrez… d’autant plus qu’il me sera agréable de regarder ce qu’il contient.

— Alors, je parle. Au seizième siècle, à ce que l’on raconte, les Espagnols, conduits par Pizarro, Cortez et d’autres conquistadores, envahirent l’Amérique méridionale. Ils trouvèrent au Mexique les Atzecs, au Pérou les Incas, deux nations indiennes jouissant d’une civilisation avancée, dont l’autorité s’étendait sur une partie notable du Brésil actuel, de la Colombie, Équateur, Bolivie, Chili, Plata, dont le nom était révéré par tous les hommes rouges du continent.

— Parfaitement exact.

Je suis heureux de constater que l’habile chasseur Francis Gairon possède des connaissances historiques…

  1. Expression canadienne qui signifie : parler franchement.