Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/84

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— Une réponse est arrivée pour le señor, lui déclara l’employé en lui remettant un papier rose sur lequel s’alignaient des lettres noires.

Et le voyageur lut :

« Al señor Cigale,
« San Vicente (Coahuila, Mexique)
.

« Savons ce qui se passe au Mexique. Approuvons tous décision prise. Cœurs suivront. Temps consacré à l’Amérique comptera comme service en France ; ai obtenu Administration russe négocier avec ministère français. Courage, prudence et souvenir ami. »

« Signé : Rundjee. »

Cigale eut un cri de joie.

Ceux qu’il avait quittés en Chine étaient rentrés sans accident à Moscou. Ils applaudissaient à sa résolution et lui envoyaient, viatique de tendresse, ces trois mots, origine de tout héroïsme : Courage, prudence, souvenir ami.

À diverses reprises, il porta le télégramme à ses lèvres, puis il le plia, le glissa sur son cœur, et quittant l’office télégraphique, il bondit à cheval, en criant :

— Maintenant, plus de sentiment ; des actes. Cigale, mon vieux camarade, souviens-toi que tu es parigot, le parigot qui connaît l’argot mais non les obstacles. Sursum corda ! dirait le Cigale bien élevé que l’instruction a transformé, ce Cigale qui jadis aurait prononcé avec la Dame aux sept petites chaises : « Sursaute, cordage ! » Mais le Cigale de la rue que j’étais autrefois est devenu un lettré qui connaît ses auteurs.

Puis, rendant la main à son cheval, il reprit le chemin de l’hacienda Rosales.

Comme il dépassait le petit bois où s’était accompli l’enlèvement de Massiliague, il lui sembla percevoir un bruit de voix.

D’un mouvement brusque il retint sa monture et prêta l’oreille. Sans doute, il avait été le jouet d’une illusion, car il n’entendit plus rien.

Il se remit en marche en murmurant :