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MILLIONNAIRE MALGRÉ LUI.

— Ainsi, tenez, murmurait-elle en baissant les yeux, quand j’ai quitté la France, j’étais agacée par l’idée qu’une de mes amies de pension avait épousé un duc. Être titrée me paraissait la chose la plus enviable du monde.

— Ah ! fit-il, pour dire quelque chose.

— Eh bien, aujourd’hui, cela me semble complètement indifférent.

Et vivement, avec une rougeur :

— Je ne m’exprime pas très bien peut-être en français… mais vous devez être certain que je dis sincèrement ma pensée, et que j’ai le désir de ne pas vous froisser… Non !… Cela me paraît indifférent, non pas parce que j’ai un prince auprès de moi, ni parce que le titre de prince soit pour moi peu de chose. Ne pensez pas cela.

Le titre est joli, il est agréable, mais il est surtout une valeur pour la personne qui le porte. Enfin, en d’autres termes, c’est un bandeau de pierres précieuses… C’est très beau, un bijou comme cela, mais si la tête qui en est ornée est laide, le bandeau ne signifie pas grand’chose.

De même, avant le titre, il y a la personne. Bonne, aimable, dévouée, cordiale, elle doit être préférée à tous les titres. Si elle en a un, cela est agréable comme un bel habit ; mais si elle n’en a pas, ce n’est point une raison pour lui témoigner moins d’affection.

À mesure qu’elle parlait, Albert se sentait de plus en plus envahi par le trouble de l’indécision.

Elle prit son silence pour une improbation.

— Vous trouvez que j’ai tort, n’est-ce pas ? dit-elle gentiment avec un regard suppliant.

— Oh ! non ! s’écria-t-il comme malgré lui.

— Vous estimez, comme moi, qu’un titre…