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Page:Ivoi - Millionnaire malgré lui.djvu/350

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LE PRINCE VIRGULE.

constellés de lettres rouges et noires ; à gauche, par un bâtiment comportant seulement un rez-de-chaussée et percé de portes trapues, solides, inquiétantes.

— Manny ; première porte à gauche, déclara un loustic… Il dort comme une souche.

En effet, des ronflements, sonores à décourager une armée de tuyaux d’orgue, arrivaient aux oreilles des assistants, adoucis par l’épaisseur de la clôture.

— Mettons donc ceux-ci au 3.

— Va pour le 3.

— La troisième porte, à son tour, tourna sur ses gonds et se referma sur les prisonniers.

Ceux-ci considérèrent le local mis, bien malgré eux, à leur disposition.

C’était une salle carrée (trois mètres cinquante sur quatre mètres), blanchie à la chaux, prenant jour uniquement par une ouverture en losange pratiquée à la partie supérieure de la porte.

À cette heure de nuit, une lanterne éclairait la courette, et c’était elle qui distribuait aux pauvres captifs quelques rayons parcimonieux.

Grâce à eux cependant, ils discernèrent le lit de camp, sorte de plancher en pente, s’appuyant au mur à cinquante centimètres du sol, pour descendre à son rebord extrême à vingt-cinq.

C’était sur cette couche peu moelleuse, sans matelas, paillasse ou couvertures d’aucune sorte, que les voyageurs allaient devoir passer la nuit.

Oh ! ils ne s’inquiétèrent pas d’abord.

Les paroles de mistress Soda tintaient encore à leurs oreilles.

— J’ai les clefs de la salle de police, avait dit la bonne et potelée créature.

Elle manifesterait sans doute son bon vouloir quand toute la caserne serait plongée dans le sommeil profond qui suit le devoir accompli.

L’extinction des feux sonna.

Un clairon mélomane l’exécuta en fanfare, avec accompagnement de variations du plus harmonieux effet.

— Dix heures, annonça Dodekhan. Allons, notre captivité ne sera plus de longue durée.

Mais onze heures, puis minuit, puis une heure du matin, furent martelés à l’horloge de la caserne et Arabella ne parut point.

Alors le découragement commença à s’appesantir sur les prisonniers.

— Elle ne pourra peut-être pas venir, prononça Laura d’un petit ton très doux et très attristé.