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MILLIONNAIRE MALGRÉ LUI.

Mona a raison. Sa douleur doit être cachée au vainqueur. D’un pas ferme, il va à la porte, l’ouvre et se montre au dehors.

Aussitôt l’officier japonais vient à lui.

— Eh bien ! général ?

— Nous accepterons la vie avec l’honneur, monsieur.

— C’est-à-dire ?…

— Qu’ayant bien combattu, nous souhaitons nous retirer avec nos armes, notre drapeau…

Le Nippon hoche la tête :

— Je ne puis prendre sur moi de vous accorder cela.

Puis par réflexion :

— Mais je puis prolonger l’armistice… pendant que j’en référerai au commandant en chef.

Le général Labianov s’incline.

— J’accepte… et je vous remercie de votre courtoisie.

Ce à quoi le Japonais répond :

— Je souhaite ardemment épargner un adversaire qui a toute mon estime.

Et il regagne la ligne de ses soldats, tandis que Stanislas Labianov rentre dans la cabane, et que, prenant Mona dans ses bras, il s’abandonne enfin à la douloureuse douceur des larmes.

Des heures s’écoulent.

C’est l’attente anxieuse.

Les soldats, Vas’li, partagent l’angoisse du général. Eux, parbleu, ils ont fait le sacrifice de leur vie ; mourir leur semble naturel ; mais à la pensée que Mona, que cette fillette, apparue parmi eux à cette heure tragique, va partager leur sort, il leur apparaît que le déchirement de la défaite est plus affreux.

La jeunesse, la gentillesse de la jeune fille leur rappellent celles qui, au loin sur le sol de la patrie, leur ont donné, au départ, le baiser d’adieu.

La cabane, où agonisent ces vaillants, se remplit d’images de femmes : mères, sœurs, fiancées, amies, parentes. C’est le grand défilé des pensées, des souvenirs, des espoirs, que la voix grondante du canon, le crépitement de la fusillade avaient en quelque sorte engourdis.

Sur les visages une même émotion se lit.

Et soudain tous sursautent.

Un coup sec vient de retentir contre la porte. Un soldat ouvre. L’officier japonais est debout sur le seuil, une enveloppe à la main.