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MISS MOUSQUETERR.

— Eh bien, qu’a-t-il dit ? fit vivement l’écrivain.

— En apprenant de moi qu’elle dormait, il s’est frotté les mains. Parfait ! parfait ! tout va bien. Comme je l’incitais à monter voir la malade, il s’y est refusé par ces mots : Non, non, je la réveillerais peut-être. Pourquoi troubler l’action bienfaisante de la nature ?

La charmante femme marqua une légère pause, et acheva :

— Je vous dis cela, pour bien vous convaincre qu’il faut bannir toute inquiétude.

Il ne trouva rien à répondre. Mais il saisit les mains de cette femme qui avait tant souffert, et qui montrait si douce compassion aux douleurs des autres. Il les pressa longuement, murmurant :

— Ah ! Madame la duchesse, vous avez raison ; attendons qu’elle soit transportable… Et vous qui songez à consoler, alors que vous êtes vous-même inconsolable, je vous jure que nous arriverons à vous donner la suprême consolation que vous cherchez.

Elle remerciait du geste, trop émue au souvenir du passé pour pouvoir s’exprimer. Soudain, tous deux sursautèrent ; un éclatement sinistre venait d’ébranler les bâtiments de la station, suivi d’une explosion violente.

— Quel est ce bruit ?

Violet s’est à demi soulevée sur sa couche. Elle interroge. Ce n’est pas de la peur ; c’est de l’étonnement. Elle a été tirée du sommeil par un bruit dont la cause lui échappe.

Avant que ses amis aient pu répondre, un ronflement caractéristique passe. Puis, sur la voie, juste en face de la fenêtre, un cratère semble s’ouvrir dans le sol. Une gerbe de flammes, une détonation assourdissante. Les vitres volent en éclats.

— Sapristi, s’écrie Max stupéfait, mais c’est un obus !

— Un obus ? répètent les deux femmes stupéfaites.

— Mais oui ; on canonne la gare.

Cependant, des clameurs montent jusqu’à eux. Des cris se croisent, on court sur les quais, dans la nuit. Puis, c’est une ruée de lourdes bottes dans l’escalier accédant à la chambre de la malade. D’un bond, le romancier est à la porte, le revolver à la main. Le battant s’ouvre. Le chef de gare apparaît, portant une lanterne, suivi par plusieurs de ses subordonnés.

— Les troupes de la tyrannie nous attaquent, hurle-t-il d’une voix essoufflée.

— Les troupes ?

— Oui, ceux qui blessèrent la jeune dame ont sans doute reçu des renforts