— Surtout, soyez discrets. Nous sommes en Asie, le pays des espions. La terre, l’eau, le ciel ont des oreilles.
À présent, les généraux demeuraient seuls.
— Par saint Georges, gronda l’Anglais, ce coquin de bouriate nous donnera le mot de l’énigme, ou bien…
— Ne le menacez pas, interrompit tristement Labianov. La menace impossible à exécuter est une manifestation inutile.
— Et pourquoi, je vous prie ?
— Parce que cet homme, à l’heure présente, est sûrement hors de notre atteinte.
Et comme Aberleen, exaspéré par cette affirmation découragée, se livrait à un discours interminable pour convaincre son compagnon d’erreur, la porte fut heurtée de nouveau par une main impatiente.
— Entrez, mille diables, gronda le gentleman décidément hors de lui.
Albarine parut aussitôt, l’air penaud, consterné.
— Général, le bouriate. Introuvable, disparu ; personne n’a remarqué son départ.
— C’est, trop fort.
L’aérostier s’essuya le front, où perlaient des gouttes de sueur, et les yeux à demi fermés, avec le courage désespéré de l’homme qui roule dans un abîme, il prononça :
— Le plus fort est, qu’à l’endroit même où je l’avais rencontré…
— Achevez donc, morbleu !
— Ce papier était accroché à une baguette fichée en terre.
Aberleen piétina.
— Un papier ! Encore un papier ! Mais il est ouvert celui-ci.
— Oui, Général. Si bien que j’ai pu lire.
— Continuez, vous avez donc juré de m’exaspérer par vos phrases suspendues !
— Ceci, Général.
Et d’une voix sourde, Albarine gémit :
« Cherche l’oiseau au plus haut des airs, cherche le poisson au fond des
eaux profondes. Ils sont plus aisés à trouver que le messager de
Celui qui veut être obéi. »