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UN ENFER SCIENTIFIQUE.

tuaire, attendant que vous soyez plus près de la mort pour être livrées aux bourreaux. Et puis, on reviendrait près de toi pour dire à celles-ci : Depuis cinq, six, huit journées, ceux de là-bas n’ont absorbé aucune nourriture ; ils se traînent péniblement dans leur prison ; ils peuvent à peine marcher ; ils demeurent couchés parce que leurs jambes refusent de les porter.

Le visage du gamin s’était métamorphosé. Ses yeux, ses lèvres crispées donnaient une impression d’épouvantable férocité. Et comme si les enfants n’eussent eu qu’une âme, qu’une volonté, les traits de miss Sourire avaient revêtu la même expression sauvage.

Les prisonniers ne pouvaient détacher leurs regards de ces deux physionomies. Une anxiété comprimait leur poitrine ; l’art du comédien, inné chez l’Asiate, pouvait-il atteindre à ce degré de perfection ! Les gamins jouaient-ils un rôle, ou bien, par une volte-face subite, se rangeaient-ils réellement parmi leurs ennemis ?

Eux, n’avaient pas un coup d’œil du côté des Européens. Ils regardaient seulement le Graveur de Prières, l’implorant de tout leur être. Il leur sourit affectueusement.

— Oui, oui, le moustique qui vient se poser sur la blessure saignante ! Son picotement n’est rien auprès de la souffrance des chairs déchirées, et cependant il semble plus insupportable, plus affolant. Qu’il soit fait ainsi que vous le désirez, enfants. Par ma bouche, le Maître Log vous remercie de savoir haïr. Dès ce soir, vous entrerez en fonctions.

Après quoi, tournant le dos à ses captifs, il appela les guerriers les plus proches.

— Que l’on dresse les tentes. Que les Européens maudits soient enfermés et gardés dans l’une d’elles.

Puis, couvrant de ses mains les têtes des deux gamins :

— Ceux-ci circuleront à toute heure, partout, sans contrôle. Ils sont mes yeux, ils sont mon cœur !