la Compagnie de navigation Caucase-Mercure, qui vous fournira les moyens de gagner Bakou sur l’autre rive de « Notre Mer ». Là mon influence cesse.
Les deux hommes se serrèrent la main.
— Et maintenant, reprit Karine, vous ne partirez que demain ; faites-moi l’amitié de déjeuner et dîner avec moi, nous boirons à la France.
— Et à la Russie.
Sir Murlyton déclina l’invitation. Il lui répugnait, à lui sujet britannique, de profiter de l’entente franco-russe. Jusqu’au lendemain matin sept heures, moment du départ du train pour Ozoun-Ada, il se logerait en ville avec sa fille.
— Ah ! à propos, demanda le Parisien, depuis des semaines je ne sais comment je vis ; à quelle date sommes-nous ?
— Au 27 janvier du calendrier russe, c’est-à-dire au 8 février du vôtre.
— J’ai donc près de deux mois pour revenir à Paris.
— Plus qu’il n’en faut.
Lavarède secoua la tête.
— La traversée de l’Europe sera plus difficile, peut-être, que tout le reste.
En se levant pour prendre congé, le gentleman jeta à terre quelques papiers posés sur le bureau du chef. Armand les ramassa et eut un mouvement de surprise :
— Tiens ! vous avez une correspondance allemande !
Il montrait une feuille couverte de caractères gothiques. Le lieutenant haussa les épaules :
— Une note de la police autrichienne.
— Ah ! quelque malfaiteur en voyage.
— Je n’en sais rien. Comme tout bon Slave j’ai horreur de tout ce qui est allemand et je ne parle pas très bien cette langue. C’est du chauvinisme, comme vous dites, ajouta-t-il en riant.
— En France, nous l’apprenons maintenant, par chauvinisme également. Permettez-moi de vous traduire ce document.
Sur un signe d’acquiescement, Armand lut à haute voix :
« Rosenstein, Fritz, né à Berlin (Prusse), gérant à Trieste, de la succursale de la Cisleithanische Bank, de Vienne.
« En fuite, emporte cinq cent mille florins à ses clients.
« Taille — moyenne.
« Yeux, cheveux et sourcils — bruns.