Page:Jacobus X - L'amour aux Colonies, 1893.djvu/188

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times de l’impudicité du forçat avaient refusé de faire le voyage de Cayenne et s’étaient fait excuser par certificats médicaux. L’une d’elles, âgée de soixante-douze ans, était encore malade de la frayeur et des suites du viol commis sur elle. Le témoin, interpellé par la phrase sacramentelle : « Êtes-vous parente ou alliée de l’accusée ? » dressa l’oreille et s’écria : « Qui ça, Mouché, mo paren à canaille-là voleu, asasin ! ou qu’a voulé ri, Mouché. — Je vois bien, » dit le Président, « qu’il n’y a, entre vous et l’accusé, aucun lien physique ou moral. Il est Normand et vous êtes Guyanaise, son poil est couleur queue de vache en gésine, vous êtes brune comme la femme de l'écclésiaste, nigra, mais pas du tout formosa, je le reconnais. Mais c’est une formalité de la Loi, que je suis obligé de remplir. — Fomosa, fomalité, » dit la vieille, « mo pas conaite moune là. Ça pas moune Cayenne, ça moune Massogan, pas moune Nêgue Roua. »

La Négresse fit ensuite sa déposition, déclarant qu’elle avait eu peur du grand sabre, et, plutôt que de se voir couper la tête, elle avait donné volontiers à l’évadé les quelques vivres qui étaient dans la case, espérant se débarrasser ainsi de lui, mais qu’ensuite, celui-ci s’était jeté sur elle le sabre à la main, et que, malgré sa résistance, il avait abusé son pov co. — « C’est grave », dit le Président ; « après vous avoir menacé de son sabre, l’accusé vous a frappé traîtreusement avec son braquemard, comme un chevalier du Moyen-Àge. Il était digne de passer devant une Cour d’amour. Eh bien ! accusé, reconnaissez-vous le viol dont le témoin vous accuse ? — Pas du tout, mon Président, » répond l’accusé, quand j’ai demandé à la vieille de la payer avec cette monnaie-là, vu que je n’avais pas d’argent dans ma bourse, plate comme une limande, elle a accepté. — Je comprends, » dit d’un ton paternel le Président,