Page:Jacobus X - L'amour aux Colonies, 1893.djvu/249

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fameux anamalis fobil, et le paroxysme lubrique atteint son apogée. Loti, dans le Roman d’un Spahi, donne la description de cette danse. On me permettra de la lui emprunter :

« Anamalis fobil ! hurlaient les Griots, en frappant sur leur tam-tam, l’œil enflammé, les muscles tendus, le torse ruisselant de sueur. Et tout le monde répétait en frappant des mains avec frénésie : anamalis fobil ! anamalis fobil ! la traduction en brûlerait ces pages. Anamalis fobil ! les premiers mots, la dominante et le refrain d’un chant endiablé, ivre d’ardeur et de licence, le chant des bamboulas du printemps ! Anamalis fobil ! hurlement de désir effréné, de sève Noire surchauffée au soleil et d’hystérie terrible, alléluia d’amour Nègre, hymne de séduction !

» Aux bamboulas du printemps, les jeunes garçons se mêlaient aux jeunes filles qui venaient de prendre en grande pompe leur costume nubile, et sur un rhythme fou, sur des notes enragées, ils chantaient tous, en dansant sur le sable : Anamalis fobil !… Bamboula ! Un Griot qui passe frappe quelques coups sur son tam-tam. C’est le rappel, et on se rassemble autour de lui. Des femmes accourent, qui se rangent en cercle serré, et entonnent un de ces chants obscènes qui les passionnent. L’une d’elles, la première venue, se détache de la foule et s’élance au milieu, dans le cercle vide où résonne le tambour ; elle danse avec un bruit de grigris et de verroterie ; son pas, lent au début, est accompagné de gestes terriblement licencieux ; il s’accélère bientôt jusqu’à la frénésie ; on dirait les trémoussements d’un singe fou, les contorsions d’une possédée.

» À bout de forces, elle se retire haletante, épuisée, avec des luisants de sueur sur sa peau noire ; ses compagnes l’accueillent par des applaudissements ou des huées, puis