Page:Jacobus X - L'amour aux Colonies, 1893.djvu/53

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ordonnances. Si un jour, après un bon déjeuner, vous êtes plongé dans une profonde sieste, vous n’entendrez pas les pas furtifs de la belle au pied léger. Elle a remarqué le clou où vous accrochez votre montre, le tiroir dans lequel vous mettez votre porte-monnaie. Le tout est enlevé prestement et vous ne revoyez jamais votre montre en or, vendue le jour même, à vil prix, à l’orfèvre-bijoutier Chinois, qui donne en échange une paire de mauvaises boucles d’oreilles.

La maîtresse Annamite de l’Européen. — On conçoit que l’Européen, dégoûté du bambou et des belles de jour, soit désireux d’avoir une femme pour son usage personnel. S’il aime les primeurs, il pourra acheter à ses parents, pour une vingtaine de piastres, une petite fille de quinze à seize ans, prise parmi celles dont le sort aurait été généralement d’échouer au bambou.

Il aura le désagrément d’avoir à former une petite créature ne sachant rien. Il a, il est vrai, l’illusion de posséder une vierge, mais nous savons que cet article est rare sur la place. Les frères et cousins ont passé par là. Et puis il y a toutes sortes d’ennuis, surtout quand on est dans l’intérieur. Outre la dot à donner aux parents, il y a, ce qui est plus sérieux, le trousseau complet à fournir à la mariée, car on vous la livre à peine couverte d’une mauvaise chemise sale en coton jadis blanc.

Si vous êtes officier ou fonctionnaire, un ông-quan, votre femme doit porter le costume assorti à votre rang, et il faut acheter le costume complet d’une femme aisée, qui comporte des chemises blanches, bleues, noires, en soie, des pantalons bleus, rouges ou verts, un vaste chapeau rond avec sa jugulaire en soie et des souliers Chinois vernis. Coût : trente piastres. Ce n’est pas tout. Il faut deux bracelets, un en or et un en argent, deux boutons d’oreilles en or, un collier en argent et un en ambre, un