Page:Jacques Bainville - Les Dictateurs.djvu/114

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encore tant de têtes solides, et qui, plus qu’un Périclès ou un César, sert de modèle exaltant aux chefs d’aujourd’hui, à un Mussolini en particulier : Napoléon Bonaparte.

Pour personne mieux que pour lui, on ne peut se livrer au jeu des hypothèses. Que se serait-il passé si ?… Que se serait-il passé si, malgré une opinion peu enthousiaste, Louis XV n’avait annexé la Corse à la France, en 1768, c’est-à-dire tout juste un an avant la naissance, dans une famille assez noble mais pauvre, d’un quatrième enfant, qui sera le fondateur d’une dynastie ? Que se serait-il passé si Charles Bonaparte n’était pas mort trois ans avant la Révolution ? Il serait devenu député de la noblesse, peut-être libéral, probablement guillotiné ou émigré, et son fils, gêné par les opinions et les exemples paternels, n’aurait pas eu à l’égard des événements nouveaux, toute cette liberté dont il jouira. La dictature a besoin, presque toujours, de la collaboration du hasard. Le hasard a toujours marché avec Bonaparte.

A-t-il des opinions, des théories ? Oui, sans doute, lorsqu’il est jeune. Elles l’abandonnent peu à peu, ou il les abandonne, avec l’expérience. Seulement, il observe, il se souvient, il est prêt à tout. À ses débuts, élève de l’École Brienne, boursier du Roi, officier à seize ans,