semblable, en somme, car les deux cousins étaient à égalité pour le culte du romanesque. C’est pourquoi il importe de n’être pas plus sévère pour l’un qu’on ne l’est pour l’autre. La question qui se pose dans le cas de Louis II est de savoir s’il s’agissait de folie pure ou d’ironie supérieure. Imaginez qu’au lieu d’être issu d’une souche royale, il eût été tout simplement un homme riche, de bonne famille. Il eût fait un grand seigneur excentrique comme on en rencontre en Angleterre. De bonne heure, ses oncles ou ses neveux auraient obtenu son interdiction, placé son patrimoine à l’abri de ses excentricités et de ses gaspillages. Et il aurait pu, jusqu’à un âge avancé, poursuivre le cours de ses manies innocentes en laissant la réputation d’un original très spirituel. Mais il possédait un trône…
Au point de vue physiologique, ses habitudes de vie nocturne avaient certainement exercé sur sa santé une fâcheuse influence. Il se plaignait souvent de névralgies torturantes : c’était un gros mangeur, un trop gros mangeur qui aurait eu besoin d’un régime sévère. Il combattait ses douleurs par des nuits entières passées en plein air : on le voyait parfois couché sur le sol, dans les bois ou bien au flanc de ses montagnes tyroliennes, roulé dans des couvertures. Ou bien il ressentait la nécessité de dépenser l’excès de ses forces par des exercices violents, de calmer ses nerfs par des déplacements précipités : de là ces raids où il fatiguait plusieurs chevaux, méprisant tout danger, sautant avec témérité les obstacles ; de là ces fantastiques promenades en traîneau, devenues légendaires. Sa neurasthénie avait aussi des manifestations plus graves. Il eut quelquefois des hallucinations, que surprirent ses domestiques. Mais il restait assez clairvoyant pour les observer lui-même. « En vérité, dit-il un certain jour en français, sa langue préférée, il y a de certains