point leur temps et leurs peines que l’un d’eux, à la dernière leçon qu’il avait donnée au royal élève, s’était peu gracieusement écrié « Voilà le plus beau jour de ma vie ! » À plus forte raison est-il faux que Louis ait jamais composé la moindre œuvrette musicale, comme on l’a dit quelquefois. Privé même, bien probablement, de notions précises sur la musique, Wagner l’a conquis comme ce « séducteur de grand style » a séduit tant de jeunes hommes : par le système nerveux d’abord, et puis par la trouvaille incomparable de ce charlatan génial, qui sut affirmer qu’il représentait une « idée » et qu’à cette « idée » appartenait l’avenir. Le jour où Wagner baptisa sa musique « musique de l’avenir », le wagnérisme était fondé comme puissance sentimentale. Il ne manquait plus qu’un adolescent sur un trône pour lancer l’inventeur et la formule.
Louis II, dès son initiation, fut en proie à la fièvre wagnérienne, dont Nietzsche, sans penser au cas du petit prince, a si exactement décrit les effets « La première chose que nous offre son art, c’est un verre grossissant on regarde au travers, on ne se fie plus à ses yeux. Tout devient grand. Wagner lui-même devient un grand homme… » Telle est exactement l’histoire de Louis II. Depuis la représentation de Lohengrin à l’Opéra de Munich, non seulement il a voulu connaître, lire, tout ce qu’avait écrit Wagner, mais encore il s’intéresse à Wagner lui-même, il le suit dans ses tribulations d’exilé. Il souffre de le voir errant, sans foyer, presque misérable ; il s’indigne de l’échec de Tannhœuser à Paris. Il ne désire la couronne que pour venir en aide à son héros.
Il n’y avait guère plus d’un mois que le nouveau règne avait commencé, on était à la fin d’avril 1864, lorsque Louis II, exécutant un projet longuement caressé, chargea son secrétaire particulier, M. de Pfistermeister, de se mettre