à la recherche de Wagner avec mission de demander au maître s’il consentirait à s’établir à Munich auprès du roi. Et ce roi était jeune, bien jeune ; il redoutait naïvement que le dieu se dérobât à son culte, que le fier exilé repoussât les avances d’un tyran. Au cas d’un refus, l’envoyé était chargé de rapporter au moins en souvenir, en relique, un objet qu’il solliciterait de la bonté du maître ; son porte-plume, son crayon… Mais Wagner ne se fit pas prier.
M. de Pfistermeister se mit en route, et l’histoire ne dit pas si le secrétaire de Sa Majesté, qui avait rang de conseiller d’État, fut bien flatté de sa mission de confiance. Wagner, en 1864, n’était qu’un musicien très discuté, qui menait une existence misérable, et qui, circonstance infiniment plus grave, était noté comme un révolutionnaire dangereux, banni à la suite de sa participation aux émeutes de 1848 à Dresde. Mais M. de Pfistermeister a négligé d’écrire ses impressions de voyage, et nous savons seulement qu’il ne trouva pas Wagner à Vienne, où il avait cru le rencontrer d’abord. Ayant appris que le musicien était venu à Mariafeld chez ses amis, les Wille, pour prendre quelque repos au bord du lac de Zurich, M. de Pfistermeister s’y rendit. Là, il apprit que, deux jours plus tôt, Wagner était rentré en Allemagne, décidé à violenter la fortune, puisque la fortune ne voulait pas se donner à lui.
Richard Wagner traversait alors la phase la plus critique de sa vie. Soucis d’argent, querelles de ménage, incertitudes sur l’avenir de son œuvre, tout l’accablait à la fois. En l’espace de quelques années, et à un âge où les déceptions retentissent d’autant plus profondément sur l’homme que l’espérance a pour lui des horizons moins larges, l’adversité lui