pour la lecture. En ce moment, je relis Shakespeare et le Faust de Gœthe. L’air des montagnes exerce sur moi une salutaire influence. Presque chaque jour, je fais une promenade à cheval. À ce que j’apprends, la première représentation du Vaisseau Fantôme pourra avoir lieu le 2 courant. Je n’y assisterai pas car c’est seulement après qu’ils ont plusieurs fois joué une pièce que les acteurs arrivent à plus de sûreté dans leur jeu et parviennent à se délivrer de certains défauts en sorte que l’auditeur a une jouissance artistique plus relevée. — J’ai l’intention, par l’exécution des œuvres importantes et sérieuses de Shakespeare, Calderon, Mozart, Gluck, Weber, de détacher le public munichois des pièces frivoles, d’éclairer son goût et de le préparer aux merveilles de vos œuvres, de lui en faciliter l’intelligence, en lui jouant d’abord les œuvres d’autres grands maîtres. Car tout doit être pénétré de la gravité de l’art. Je vous envoie, mon très cher ami, ma photographie peinte…, parce que je crois, je suis sûr que, de tous les hommes qui me connaissent, c’est vous qui m’aimez le mieux. Puissiez-vous penser, en la regardant, que celui qui vous l’envoie vous a voué un amour qui durera éternellement, qu’il vous aime avec feu, aussi fort qu’un homme peut aimer. »
Nous avons omis beaucoup de détails sur les chanteurs et
leurs qualités, sur la manière dont il convient de jouer et
d’interpréter les œuvres du maître. C’est l’artiste, chez Wagner,
qui intéresse le roi. Mais, bientôt, ce ne sera
plus que l’homme. Un événement transformera cette admiration
et cette amitié du jeune amateur de théâtre et d’art
en un amour contrarié. On voudra contraindre Louis II à
se séparer de Wagner. Du jour où la curiosité du public
déflorera cette intimité, où les exigences de l’opinion menaceront
de la détruire, Louis II sentira naître en son cœur la
haine du vulgaire, à qui il ne reconnaîtra pas le droit d’intervenir
dans sa vie privée. Et, de toute son âme, il s’atta-