ver comme par magie le monument wagnérien. Il en parle dans chacune de ses lettres à son ami. Il en fait sa chose personnelle, la grande pensée de son règne. Le projet de théâtre déchaîna l’indignation générale. Et les journaux, qui avaient longtemps hésité avant d’intervenir, en devinrent les interprètes. Au mois de février 1865, toutes sortes de bruits commencent à courir dans la presse sur Wagner. Un jour même, on annonce sa disgrâce, et le roi s’empresse d’écrire au favori une lettre bien dangereusement exaltée :
« 0 Tristan ! — 0 Siegfried ! Misérables et aveugles gens qui osent parler de disgrâce, qui n’ont pas, qui ne peuvent avoir l’idée de ce que c’est que notre amour. — Pardonnez-leur, car ils ne savent ce qu’ils font ! — Ils ne savent pas que vous êtes, que vous avez toujours été et que vous serez toujours tout pour moi, jusqu’à la mort que je vous ai aimé avant de vous voir mais je sais que mon ami me connaît et que sa foi en moi ne se laissera jamais ébranler Oh ! écrivez-moi encore !
J’espère vous voir bientôt. En amour sincère, ardent et éternel, »
Fort de l’appui du roi, Wagner crut pouvoir utilement démentir les nouvelles de sa disgrâce, répandues par la presse. Il était trop tard, et ses ennemis s’apprêtaient à lui porter un coup décisif. Le 19 février, l’important et grave Journal universel d’Augsbourg, sorte de Temps de la Bavière, publiait un article anonyme intitulé Richard Wagner et l’opinion publique. La rédaction, dans un préambule hypocrite, assurait que cette lettre exprimait la pensée d’un « homme impartial ». C’était un petit pamphlet assez bien tourné et qui résumait les rancunes de la bourgeoisie contre Wagner… Certes, on lui reconnaît tout le talent du monde ce n’est pas