Page:Jacques Bainville - Louis II de Bavière.djvu/69

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amateur détrôné composa un sonnet dont la chute était un doute : « Puisse le monde ne point gâter ton bonheur. Puisse-t-on ne jamais dire Leur amour est mort ! »

Le sonnet eut à peine le temps de venir du pays où fleurit l’oranger que son quatorzième vers se trouva avoir été une prédiction trop juste.

Tout était prêt pour les réjouissances et pour les fêtes. Déjà, la future reine avait formé sa cour et, à la Résidence, ses appartements étaient aménagés. On avait arrêté les détails de la cérémonie, distribué les cadeaux, officiellement annoncé le mariage pour le 12 octobre et même répandu dans le royaume des médailles commémoratives, quand, au dernier moment, des rumeurs étranges se répandirent. Le mariage du roi est différé, annonçaient les uns, et les autres, qui avaient raison, disaient : il est rompu. On ne tarda pas à apprendre de source certaine que le roi, après un terrible accès de colère pendant lequel il avait brûlé tous les souvenirs de sa fiancée, et même jeté par les fenêtres de la Résidence son buste et ses portraits, s’était dégagé de sa promesse.

Il y a un curieux petit roman de Stendhal, Armance, où l’on voit un amoureux hésiter, temporiser, laisser échapper toutes les occasions pour des raisons mystérieuses. À la fin, le secret se découvre, c’est un secret physiologique. Louis II fut-il retenu par une appréhension de la même nature ? On l’a beaucoup affirmé. Pareil au personnage d’Armance, il aurait, à plusieurs reprises, demandé que le mariage fût différé, et c’est le père de la princesse Sophie, alarmé, qui aurait pris l’initiative de la rupture. Cependant, des fantaisies plus bizarres encore avaient pu jeter l’inquiétude dans la famille du duc Maximilien. Il passait par le cerveau de Louis II de trop étranges caprices. S’adonnant déjà à des habitudes de vie nocturne, il ne reculait pas devant l’idée