seul, Chauvelin, Maupeou. Des copies de Watteau ou de Boucher, de Le Brun ou de Van der Meulen, s’appliquent aux plafonds et aux murs, parmi les ors prodigués. Et de ces pastiches si patiemment poursuivis se lève une atmosphère indéfinissable de solitude et d’écrasement. L’homme qui dicta ce choix de meubles brillants, de tentures éclatantes, n’était pas un voluptueux insouciant, avide ou curieux de plaisir. Ce décor de luxe et de fêtes ne servait qu’aux débauches d’une imagination meurtrie. Sur cette sorte de musée intime où Louis II passait les nuits à des rêves inexpliqués, un morne mystère persiste à s’appesantir. Et Linderhof, qui donne d’abord l’impression d’une fantaisie historique assez médiocre, laisse au visiteur l’angoisse d’avoir approché des lieux témoins d’une douleur ou d’une folie. Sur Louis II, « dégénéré supérieur », égoïste de génie, artiste manqué ou cœur incompris, nous avouons qu’après enquête et réflexion notre jugement hésite encore. Des étranges salons mauves et bouton d’or de Linderhof ne se dégage que la certitude d’un secret. Ce trouble et ce charme qu’il répandait, cette sensibilité, ce pudendum dont il n’a pas dit le mot, continuent de flotter sur les lieux où il s’est le plus complaisamment attardé.
Cependant, l’obsession du grandiose ne le quittait pas. Versailles, — où il était revenu sans doute, car ses fuites dans la montagne pouvaient dissimuler bien des voyages rapides ou même prolongés, — Versailles le hantait. Mais il lui fallait le palais lui-même, avec sa noble façade et la perspective des jardins et du grand canal. Plus de ces réductions dont se contentaient les menus princes allemands de l’autre siècle. C’est Versailles intégral que Louis II se donna pour tâche de reconstituer en Bavière.
Le site qu’il avait désigné était admirable. Une île aride et nue au milieu d’un lac mélancolique, le Chiemsee, un