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AGR


Tandis qu’il professait à Louvain, un de ses écoliers, lisant un livre de conjurations, fut étranglé par le diable. Agrippa, craignant qu’on ne le soupçonnât d’être l’auteur de cette mort, parce qu’elle était arrivée chez lui, commanda au malin esprit de rentrer dans le corps, et de le faire marcher sept ou huit jours sur la place publique, avant de le quitter. Le diable obéit, et laissa le corps chez les parens du jeune homme.

On ne peut nier, dit Thevet, qu’Agrippa n’ait été ensorcelé de la plus fine et exécrable magie qu’on puisse imaginer, et de laquelle, au vu et au su de chacun, il a fait profession évidente. Il était si subtil, qu’il grippait, de ses mains podagres et crochues, des trésors que beaucoup de vaillans capitaines ne pouvaient gagner par le cliquetis de leurs armes et leurs combats furieux. Il composa le livre de la Philosophie occulte, censuré par les chrétiens, pour lequel il fut chassé de la Flandre, où il ne put dorénavant être souffert ; de manière qu’il prit la route d’Italie, qu’il empoisonna tellement, que plusieurs gens de bien lui donnèrent encore la chasse, et il n’eut rien de plus hâtif que de se retirer à Dôle. Enfin il se rendit à Lyon, dénué de facultés ; il y employa toutes sortes de moyens pour vivoter, remuant le mieux qu’il pouvait la queue du bâton ; mais il gagnait si peu, qu’il mourut en un chétif cabaret, abhorré de tout le monde, et détesté comme un magicien maudit, parce que toujours il menait en sa compagnie un diable sous la figure d’un chien noir.