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À l’époque où l’on en cesse le chant, l’Alléluia était personnifié et représenté par une toupie qu’un enfant de chœur jetait au milieu de l’église et poussait dans la sacristie avec un fouet. Cela s’appelait l’Alléluia fouetté.

On appelle trèfle de l’Alléluia mie plante qui donne, vers le temps de Pâques, une petite fleur blanche étoilée. Elle passe pour un spécifique contre les philtres.

Allix. Voici un de ces traits qui accusent l’ignorance et la légèreté des anciens juges de parlement. — Allix, mathématicien, mécanicien et musicien, vivait à Aix en Provence, vers le milieu du dix-septième siècle ; il fit un squelette qui, par un mécanisme caché, jouait de la guitare. Bonnet, dans son Histoire de la musique, page 82, rapporte l’histoire tragique de ce pauvre savant. Il mettait au cou de son squelette une guitare accordée à l’unisson d’une autre qu’il tenait lui-même dans ses mains, et plaçait les doigts de l’automate sur le manche ; puis, par un temps calme et serein, les fenêtres et la porte étant ouvertes, il s’installait dans un coin de sa chambre et jouait sur sa guitare des passages que le squelette répétait sur la sienne. Il y a lieu de croire que l’instrument résonnait à la manière des harpes éoliennes, et que le mécanisme qui faisait mouvoir les doigts du squelette n’était pour rien dans la production des sons. (Nous citons M. Fétis[1] sans l’approuver, et nous le renvoyons aux automates musiciens de Vaucanson, qui n’étaient pas des harpes éoliennes). — Quoi qu’il en soit, poursuit le biographe, ce concert étrange causa de la rumeur parmi la population superstitieuse de la ville d’Aix ; Allix fut accusé de magie, et le parlement lit instruire son procès. Jugé par la chambre de la Tournelle, il ne put faire comprendre que l’effet merveilleux de son automate n’était que la résolution d’un problème mécanique. L’arrêt du Parlement le condamna à être pendu et brûlé en place publique, avec le squelette complice de ses sortilèges ; la sentence fut exécutée en 1664. »

Almanach. Nos ancêtres traçaient le cours des lunes pour toute l’année sur un petit morceau de bois, carré qu’ils appelaient al-mon-agt (observation de toutes les lunes) : telles sont, selon quelques auteurs, l’origine des almanachs et l’étymologie de leur nom.

D’autres se réclament des Arabes, chez qui al-manack veut dire le mémorial.

Les Chinois passent pour les plus anciens faiseurs d’almanachs. Nous n’avons que douze constellations ; ils en ont vingt-huit. Toutefois leurs almanachs ressemblent à ceux de Matthieu Laensberg par les prédictions et les secrets dont ils sont farcis[2].

Bayle raconte l’anecdote suivante, pour faire voir qu’il se rencontre des hasards puérils qui éblouissent les petits esprits et donnent un certain crédit à l’astrologie. Guillaume Marcel, professeur de rhétorique au collège de Lisieux, avait composé en latin l’éloge du maréchal de Gassion, mort d’un coup de mousquet au siège de Lens. Il était près de le réciter en public, quand on représenta au recteur de F université que le maréchal était mort dans la religion prétendue réformée, et que son oraison funèbre ne pouvait être prononcée, dans une université catholique. Le recteur convoqua une assemblée ou il fut résolu, à la pluralité des voix, que l’observation était juste, Marcel ne put donc prononcer son panégyrique ; et les partisans de l’astrologie triomphèrent en faisant remarquer à tout le monde que, dans l’almanach de Pierre Larrivey pour cette même année 1648, entre autres prédictions, il se trouvait écrit en gros caractères : LATIN PERDU !

Almanach du diable, contenant des prédictions très-curieuses pour les années 1737 et 1738 ; aux Enfers, in-24. Cette plaisanterie contre les jansénistes était l’ouvrage d’un certain Quesnel, joyeux quincaillier de Dijon, affublé d’un nom que le fameux appelant a tant attristé. Elle est devenue rare, attendu qu’elle fut supprimée pour quelques prédictions trop hardies. Nous ne la citons qu’à cause de son titre. Les jansénistes y répondirent par un lourd et stupide pamphlet dirigé contre les jésuites et supprimé également. Il était intitulé Almanach de Dieu, dédié à M. Carré de Montgeron, pour l’année 1738, in-24 ; au Ciel…

Almoganenses, nom que les Espagnols donnent à certains peuples inconnus qui, par le vol et le chant des oiseaux, par la rencontre des bêtes sauvages et par divers autres moyens, devinaient tout ce qui devait arriver. « Ils conservent avec soin, dit Laurent Valla, des livres qui traitent de cette espèce de science ; ils y trouvent des règles pour toutes sortes de pronostics. Leurs devins sont divisés en deux classes : finie de chefs ou de maîtres, et l’autre de disciples ou d’aspirants. » — On leur attribue aussi l’art d’indiquer non-seulement par où ont passé les chevaux et les autres bêtes de somme égarées, mais encore le chemin qu’auront pris une ou plusieurs personnes ; ce qui est très-utile pour la poursuite des voleurs. Les écrivains qui parlent des Almoganenses ne disent ni dans quelle province ni dans quel temps ont vécu ces utiles devins.

Almuchefi, miroir merveilleux. Voy. Bacon.

Almulus (Salomon), auteur d’une explication des songes en hébreu, in-8o. Amsterdam, 1642.

  1. Biographie universelle des musiciens.
  2. L’almanach de Matthieu Laensberg commença à paraître en 1636. Mais, avant lui on avait déjà des annuaires de même nature. Fischer a découvert à Mayence, en 1804, un almanach imprimé pour 1457, tout à fait à la naissance de l’imprimerie.