Page:Jaloux - Le reste est silence, 1910.djvu/249

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plombait cette étrange pièce. Herbert songeait…

Non, May ne l’avait point exorcisé. Bien des figures d’autrefois reparaissaient devant lui, avec une intensité telle qu’il ne pouvait échapper à leur emprise et que ces souvenirs à demi-vivants l’oppressaient d’une angoisse insurmontable. Il ne réussissait pas à épuiser l’émotion qui lui venait d’elles, et il lui fallait ressusciter leur image ou lutter contre ses remords. Pâles figures dansantes au fond de sa mémoire, entre deux rangées de cyprès ! Ces femmes revenaient en glissant avec leurs chevelures bouclées, leurs joues couvertes de fard, leurs corps de jupes monumentaux, leurs voiles, leurs grands chapeaux qui laissaient pendre des rubans ou balançaient des plumes, leurs grimaces, leurs sourires. À cause d’elles, Herbert se souvenait de telle vaste chambre lambrissée de Soho ou de Covent-Garden, où il avait reçu secrètement quelques-unes des plus belles. Il regrettait tel coin de jardin, de salon, aux eaux, à Scarborough ou à Bath, les soirées devant une table de whist,