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LE RESTE EST SILENCE…

distraire, avec une admirable patience, édifiait des constructions fragiles. Il fallait, dans un fort papier, découper, selon les indications écrites, les derniers morceaux de l’architecture, en plier les bords et les coller les uns aux autres. La maison s’élevait ainsi. Mais c’était un travail décevant. Il était nécessaire de maintenir longtemps les parties ainsi soudées pour qu’elles ne se détachassent pas avant suture complète, et, quand on croyait avoir atteint ce résultat et qu’on retirait ses doigts, des pans de murs venaient avec eux.

Après ma guérison, j’avais précieusement conservé ces immeubles. Je me souviens d’une crèche étrange, en ruines, presque en plein vent, que j’ai retrouvée depuis dans une Nativité d’Albert Dürer, mais celle-ci n’abritait que de plates images dessinées, tandis que la mienne contenait jusqu’à douze fantassins embusqués et déchargeant leurs fusils. Je revois aussi une église russe, un cottage anglais, et le palais d’un résident à Batavia, avec son fronton soutenu par quatre colonnes et un palmier