Page:James - Le Tour d’écrou (trad. Le Corbeiller), 1968.djvu/12

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« Je reconnais bien — pour ce qui est du fantôme de Griffin ou tout ce que vous voudrez que ce soit — que le fait d’apparaître d’abord à un petit garçon d’un âge si tendre ajoute à l’histoire un trait particulier. Mais ce n’est pas, à ma connaissance, la première fois qu’un exemple de ce genre délicieux s’applique à un enfant. Si cet enfant donne un tour de vis de plus à votre émotion, que direz-vous de deux enfants ?

— Nous dirons, bien entendu, s’écria quelqu’un, que deux enfants donnent deux tours… et que nous voulons savoir ce qui leur est arrivé. »

Je vois encore Douglas ; il s’était levé et, adossé à la cheminée, les mains dans les poches, il regardait son interlocuteur de haut en bas.

« Il n’y a jusqu’ici que moi qui l’aie jamais su. C’est par trop horrible. »

Naturellement, plusieurs voix s’élevèrent pour déclarer que ceci donnait à la chose un attrait suprême. Notre ami, préparant son triomphe avec un art paisible, regarda son auditoire et poursuivit :

« C’est au-delà de tout. Je ne sais rien au monde qui en approche.

— Comme effet de terreur ? » demandai-je.

Il sembla vouloir dire que ce n’était pas si simple que cela, mais qu’il ne pouvait trouver des termes exacts pour s’exprimer. Il passa sa main sur ses yeux, eut une petite grimace douloureuse :

« Comme horreur. Comme horreur — horrible !

— Oh ! c’est délicieux ! » s’écria une femme.

Il ne parut pas entendre. Il me regardait, mais comme s’il voyait à ma place ce dont il parlait.

« Comme un ensemble de hideur, de douleur et d’horreur infernales.

— Eh bien, lui dis-je alors, veuillez vous asseoir et commencer. »

Il se retourna vers le feu, repoussa une bûche du pied et la contempla un instant. Puis, revenant à nous :