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Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/265

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s’étaient trouvés dans sa chambre de malade, comme « à celui de tous ses jeunes amis qui lui a été le plus près et le plus aimé » (lettre de Reichel du 6 juillet 1876).


L’Internationale espagnole continuait son existence en partie double, mi-publique, mi-secrète. Le Bulletin du 4 octobre 1874 parle d’une circulaire de la Commission fédérale espagnole[1] : « La plus grande partie du contenu de cette circulaire étant d’un caractère tout à fait privé, nous n’en pouvons donner connaissance à nos lecteurs » ; notre journal mentionne seulement la continuation de la grève des tonneliers et mariniers à Tarragone, dont les frais se montent à 18.000 réaux (4500 fr.) par semaine ; il annonce que depuis le dernier Congrès régional espagnol, tenu en juin, cinq nouvelles fédérations locales se sont constituées, et qu’il est question de reprendre la publication du Boletin : seulement ce journal, organe officiel de la Fédération espagnole, sera clandestin et ne pourra circuler que sous enveloppe.

Une correspondance particulière, publiée dans le Bulletin du 29 novembre, parle de l’insurrection carliste, qui n’a pu « atteindre le degré de développement que nous lui avons vu prendre, que grâce à la complicité de tous les gouvernements qui se sont succédé », et qui se trouvait à ce moment dans un état stationnaire : « Vous pourrez trouver extraordinaire que j’attribue l’extension prise par le carlisme aux gouvernements qui se sont succédé en Espagne : mais soyez assurés que rien n’est plus certain. On a toujours cherché à détourner l’attention du peuple au moyen de la guerre carliste, en attribuant à celle-ci une importance que démentait le peu d’énergie déployée contre les bandes insurgées. Il y a peu de jours encore, j’entendais dire à un épais bourgeois : « Les carlistes sont un mal, c’est vrai, mais pour nous ils ont été un bien, puisque, si le peuple n’avait pas été occupé par la guerre, la révolution sociale était inévitable »... Si le gouvernement ne s’inquiète que médiocrement du carlisme, comme le prouve la mise en liberté des carlistes qu’on arrête çà et là de temps en temps, et le fait que le cabecilla Lozano, qui aurait dû, selon les ordonnances, être fusillé, obtiendra probablement sa grâce, il ne reste pas indifférent à l’égard des éléments révolutionnaires ou qui lui paraissent tels : ceux-là sont déportés en masse, sans autre forme de procès, et sans même vingt-quatre heures d’avertissement préalable. Il y a quelques jours, un navire est parti de Barcelone, emmenant mille déportés aux îles Mariannes. »

Une autre circulaire de la Commission fédérale, en décembre, contient les renseignements suivants (publiés dans le Bulletin du 3 janvier 1875) :

« Depuis notre dernière circulaire, un certain nombre de membres de notre Association ont encore été arrêtés, la police a saccagé le local de plusieurs sociétés ouvrières, et un sergent de carabiniers a assassiné un tonnelier de Reus, au moment où ce malheureux ouvrier passait devant le local de sa société, qui avait été saccagé. Les internationaux détenus dans les différentes prisons et forteresses de la région sont traités de la manière la plus infâme et la plus brutale. Par contre, les prisonniers politiques bourgeois sont l’objet des plus grands égards, et on ne déporte aux îles Mariannes que des ouvriers et des internationaux.

« Diverses fédérations locales nous ont demandé de faire savoir aux autres fédérations que les alphonsistes travaillent à soulever l’armée dans différentes localités, afin de proclamer roi d’Espagne le soi-disant prince Alphonse. Les républicains, de leur côté, font aussi des préparatifs, et ils ont pris pour bannière celle de notre Association internationale, sans doute afin d’attirer à eux tous les ouvriers révolutionnaires. La Commission fédérale pense que les internationaux ne doivent pas rester indifférents devant les événements qui pourraient avoir lieu. Notre ligne de conduite a été déterminée d’avance par le Manifeste du quatrième Congrès espagnol [Le Congrès de Madrid de juin 1874 ;

  1. Le procès-verbal du Comité fédéral jurassien du 28 sept. 1874 dit: « 3e circulaire de la Commission fédérale espagnole ; ne pouvant pas la lire, il est décidé de l’envoyer au compagnon Guillaume pour la traduire ».