Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/429

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ment notre misère et le mensonge de nos institutions républicaines !»

Voilà l’appréciation des ouvriers suisses sur le tir fédéral.


Nous voulûmes profiter du tir fédéral pour faire connaître l’Internationale, en distribuant à grand nombre, aux Suisses et aux étrangers — surtout aux Français — accourus à cette fête, un numéro du Bulletin (16 juillet) dont la première page était consacrée à un historique de notre Association et à l’exposé de ses principes. Voici le passage principal de cet article :


L’Internationale.

Le présent numéro du Bulletin se trouvera, à l’occasion du tir fédéral de Lausanne, entre les mains de nombreux lecteurs français pour lesquels, grâce à la loi Dufaure, l’Internationale est restée jusqu’à présent une chose connue de nom seulement, une énigme inexpliquée, et peut-être un épouvantail.

Il n’est donc pas hors de propos de rappeler en quelques mots ce qu’est l’Internationale, d’où elle vient et ce qu’elle veut.

[Suit un exposé du but de l’Internationale et de ses moyens d’action, après quoi le Bulletin continue ainsi :]

La guerre de 1870 apporta une profonde perturbation dans l’ordre économique et politique de l’Europe entière... Mais ni les rigueurs réactionnaires, ni les discordes intérieures, aujourd’hui apaisées, n’avaient pu tuer l’idée de l’Internationale. En Espagne, l’Association, supprimée en apparence à la suite du coup d’État de Pavia, n’en a pas moins gardé toute son organisation, et continué à tenir, quoique en secret, ses congrès [et ses conférences] périodiques ; en Italie, après deux ans de disparition forcée, l’Internationale recommence sa propagande au grand jour avec une nouvelle ardeur ; en Belgique, en Hollande, en Suisse, en Portugal, elle n’a jamais cessé d’exister, de lutter à ciel ouvert ; et dans les pays comme l’Angleterre, l’Allemagne, le Danemark, l’Amérique, où le mouvement ouvrier paraît n’avoir, jusqu’ici, qu’un caractère national, les socialistes comprennent très bien la nécessité de la solidarité internationale, et, en ce qui concerne l’Allemagne du moins, c’est l’arbitraire gouvernemental qui s’oppose seul à ce que ce sentiment de solidarité se traduise par un pacte effectif d’union des ouvriers allemands avec ceux des autres pays.

En France, malgré la loi Dufaure, de nombreuses sections de l’Internationale ont continué à exister clandestinement. Mais ce qui est une preuve plus frappante encore de la vitalité du principe international, et de la manière spontanée dont il s’impose à tous ceux qui veulent travailler à la cause de l’émancipation des classes laborieuses, c’est que ceux-là même qui, en France, acceptant la situation légale qui leur est faite, cherchent à en tirer le meilleur parti possible en créant les organisations pacifiques connues sous le nom de syndicats ouvriers, ceux-là même, disons-nous, quoique n’ayant peut-être jamais lu les statuts de l’Internationale, en mettent les principes en pratique : ils envoient des délégations ouvrières à l’Exposition de Philadelphie, ils manifestent hautement le désir d’un rapprochement amical entre les travailleurs de tous les pays du monde...

Lorsque furent rédigés pour la première fois les statuts généraux de