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Fédération anglaise. Les résolutions qui y furent prises ne furent pas moins énergiques, comme on va le voir, que celles des Fédérations du continent ; et des révélations décisives y furent faites, par Hermann Jung et Eccarius, sur les intrigues au moyen desquelles Engels et Marx s’étaient fabriqué une majorité pour le Congrès de la Haye. Voici le compte-rendu du Bulletin :


Le Congrès anglais.

Le Congrès de la Fédération anglaise s’est réuni le 26 janvier à Londres. Les délégués suivants étaient présents : Dunn, Bennett, Eccarius, Foster, Grout, Hales, Jung, Mac Ara, Pape, Roberts, Seaman et Weston. Il fut en outre donné lecture de lettres d’adhésion des Sections de Normanby, Leeds, Nottingham, Glasgow, Aberdeen, Liverpool, Manchester, Bath, Leicester.

Dans la première séance, le citoyen Hales exposa longuement l’histoire du Congrès de la Haye et des démêlés du Conseil fédéral anglais avec le Conseil général. Nous empruntons à son rapport un détail encore inédit, à joindre à la collection de faits scandaleux que l’on connaît déjà. Le citoyen Milke figure dans la liste officielle des délégués de la Haye comme représentant de la Section de Berlin. Or, lorsque Hales écrivit, quelque temps après, à propos d’une grève de relieurs, au citoyen Friedländer de Berlin, qui avait aussi été à la Haye comme délégué de Zürich, il reçut pour réponse qu’il n’existait pas de section de l’Internationale à Berlin, mais qu’on en constituerait une prochainement[1]. Vichard, l’un des délégués français, membre de la fameuse Commission d’enquête sur l’Alliance, n’était pas même membre de l’Internationale.

Dans la séance de l’après-midi, le citoyen Jung fit une série de révélations des plus édifiantes sur les agissements de Marx et d’Engels. Nous allons résumer les principaux points de son discours.

« Vous savez tous, dit Jung, que j’ai été pendant longtemps intime avec Marx. Précédemment, il avait l’habitude de consulter ses amis sur ce qu’il y avait à faire, quand il se présentait une question de quelque importance, et nous nous entendions toujours avant que les affaires fussent traitées dans les séances officielles du Conseil. Après qu’Engels fut arrivé à Londres [septembre 1870], il n’en fut plus ainsi ; il en résulta que souvent nous nous trouvions divisés dans les séances officielles, et Marx perdit ainsi graduellement la confiance de ses anciens amis. Il introduisit alors dans le Conseil un nouvel élément, les blanquistes, et adopta une politique de bascule, inclinant tantôt d’un côté, tantôt d’un autre. Dans le sous-comité je faisais opposition : tout ce que Marx y disait était adopté d’emblée. Je réclamais des explications, et on m’appelait le réactionnaire[2]...

« Quand vint le Congrès de la Haye, Engels voulait qu’on s’assurât une

  1. Promesse impossible à tenir, puisqu’en Allemagne les lois ne permettaient pas aux adhérents individuels de l’Internationale de se grouper pour former des sections.
  2. Ici se place un passage relatif aux affaires d’Espagne et à la lettre de menaces écrite par Engels, le 24 juillet 1872, au Conseil fédéral espagnol, passage que le résumé du Bulletin ne donne pas. Mais ce passage a été analysé dans le Mémoire de la Fédération jurassienne, p. 250, et j’ai reproduit cette analyse au tome II, pages 308-309.