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Page:James Guillaume - L'Internationale, I et II.djvu/406

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joindre à la fédération de Genève, tout en conservant son programme propre et en continuant à regarder la Solidarité comme l’organe de ses principes. Nous espérions, de la sorte, faire sentir clairement aux Genevois que nous ne leur gardions pas rancune, que nous ne cherchions point à former un « Sonderbund » et à séparer d’eux les autres Sections pour les grouper dans une fédération exclusive ; et en même temps, par l’union de Vevey avec Genève, nous pensions trouver une occasion de faire de la propagande au sein même de la fédération genevoise[1]. »

Je publiai sur ce sujet, dans la Solidarité, l’article suivant (20 août) :


Le groupement géographique.

La Section centrale de Vevey a décidé, dans son assemblée générale du 7 courant, de se joindre à la fraction de l’ancienne Fédération romande qui a son siège à Genève.

Voilà un pas vers la solution de ce conflit qui semblait devoir se perpétuer indéfiniment. La résolution de la Section de Vevey indique, à notre avis, la véritable marche à suivre pour apaiser l’irritation et ramener le bon accord parmi les internationaux de la Suisse romande.

La marche à suivre, selon nous, la voici :

Au Congrès de la Chaux-de-Fonds, les internationaux s’étaient divisés en deux groupes représentant deux opinions, deux tendances différentes.

Le premier groupe, celui qui avait voté l’admission de la Section de l’Alliance de Genève, représentait la tendance collectiviste révolutionnaire. Il se composait d’hommes ayant pour la plupart passé par l’école de Proudhon, mais qui s’étaient affranchis de son dogmatisme et ne voulaient plus connaître qu’un socialisme absolument scientifique et expérimental d’un côté, c’est-à-dire rompant avec tout système a priori, et absolument populaire de l’autre, c’est-à-dire pratique, vivant, agissant, et non plus abstrait et doctrinaire. Le trait essentiel de ce groupe, c’était son esprit anti-autoritaire : la destruction de toutes les autorités, et l’avènement d’une société où la liberté de chacun ne serait limitée que par la solidarité de tous, tel était et tel est encore son programme. Ajoutons que la tendance internationale, ou en d’autres termes anti-nationale, n’y était pas moins fortement prononcée, et que les hommes de cette nuance conçoivent l’Europe future non comme une fédération de nations distinctes, constituées chacune en république pour son compte, mais, abstraction faite de tout État politique, comme une simple fédération d’associations de travailleurs, sans aucune distinction de nationalité.

Il nous sera plus difficile de caractériser le second groupe, parce que nous nous trouvons cette fois en présence d’hommes dont plusieurs se sont carrément déclarés hostiles à nos tendances et à nos personnes, et qui se plaignent d’être calomniés par nous toutes les fois que nous parlons d’eux. Essayons toutefois d’en parler avec toute l’impartialité et l’objectivité dont un esprit sincère est capable.

La plus grande partie de ce groupe était formée par des ouvriers genevois qui, de simples radicaux politiques, étaient devenus socia-

  1. Mémoire de la Fédération jurassienne, p. 166. — Bien entendu, si ce plan s’était réalisé, il aurait dû être appliqué intégralement : la Section de l’Alliance serait entrée dans la fédération genevoise, au même titre que la Section de Vevey, de par sa situation géographique ; et la Section centrale (coulleryste) de la Chaux-de-Fonds serait entrée dans notre fédération des Montagnes.