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QUATRIÈME PARTIE


LA FÉDÉRATION JURASSIENNE : PREMIÈRE PÉRIODE


(Novembre 1871 — Septembre 1872)




I
Le Congrès de Sonvillier (12 novembre 1871) : fondation de la Fédération Jurassienne. — La circulaire de Sonvillier.


La Section centrale de Neuchâtel élut pour ses délégués au Congrès de Sonvillier un ouvrier serrurier, Auguste Dupuis, et moi. Nous partîmes le samedi après-midi 11 novembre, et nous voyageâmes, de Neuchâtel à Sonvillier, avec les deux délégués de la Section de propagande et d’action révolutionnaire socialiste de Genève, Jules Guesde et Joukovsky. À ceux-ci s’étaient joints, à titre individuel, Lefrançais et Malon, qui désiraient assister au Congrès pour faire la connaissance des internationaux du Jura. Le train, marchant d’abord dans la direction de l’ouest, traversa, en vue du lac de Neuchâtel, des campagnes plantées de vignes, puis des prairies et des bois, pour s’arrêter à Chambrelien, gare de « rebroussement » ; se dirigeant ensuite vers le nord-est, il s’éleva, par une pente assez raide, le long du versant nord du Val de Ruz, à travers des forêts de sapins, jusqu’à l’entrée du grand tunnel dit des Loges, dans lequel il s’engouffra pour une dizaine de minutes ; il en ressortit à la petite gare des Convers, située, comme au fond d’un puits, dans un site sauvage, au pied du Roc Mil-Deux, et entre l’extrémité du tunnel des Loges et l’entrée du second tunnel, plus court, dit du Mont-Sagne, qui conduit à la Chaux-de-Fonds. Aux Convers, nous quittâmes le train pour prendre la voiture postale, et, à la nuit tombante, nous arrivions, après avoir descendu le val supérieur de la Suze et traversé le village de Renan, au village de Sonvillier. Nos compagnons français avaient examiné d’un œil curieux, pendant toute la durée du trajet, ce pays d’un aspect si inattendu, qui ne ressemblait à rien de ce qu’ils étaient accoutumés à voir ; ils entraient dans un monde inconnu, qui leur réservait des impressions tout à fait nouvelles.

Accueillis à bras ouverts par les camarades de Sonvillier et par ceux des délégués qui étaient déjà arrivés, nous nous logeâmes à l’hôtel de la Balance.

Le dimanche matin, à neuf heures, le Congrès s’ouvrit, dans la grande salle de l’hôtel. Huit Sections seulement, sur celles qui formaient notre Fédération, étaient représentées ; en voici la liste, avec les noms des délégués :

Section centrale du Locle : Frédéric Graisier, graveur ; Auguste Spichiger, guillocheur ;