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que les dépositions faites, seraient publiés par eux dans un organe officiel de l’Association.

La Haye, le 7 septembre 1872.

Le Président : Ph.-P. Cuno, délégué de Stuttgart et de Düsseldorf.

Le Secrétaire : Lucain, délégué de France.


Quelques courtes observations feront voir à la fois la stupidité et l’infamie de ce document.

On y parle de la société l’Alliance, tantôt comme d’une société secrète, tantôt comme d’une société publique, de sorte que d’un bout à l’autre du rapport règne une confusion complète sur ce point.

On y dit, d’une part, que l’Alliance secrète a existé, mais qu’il n’est pas suffisamment prouvé qu’elle existe encore, et, plus loin, que Bakounine a tenté, et peut-être réussi, de fonder une société appelée l’Alliance, — et d’autre part la Commission se dit convaincue que Guillaume et Schwitzguébel font encore partie de la société dite l’Alliance. Est-il possible de tomber dans une contradiction plus enfantine ? Car, ou bien la Commission affirme, comme elle le fait plus haut, qu’il ne lui est pas suffisamment prouvé que l’Alliance existe encore, ni même — ceci est un comble — que Bakounine ait réussi à la fonder, et alors il est absurde de dire que Guillaume et Schwitzguébel en font partie ; ou bien, en effet, il existe des preuves, qui ont paru convaincantes à la Commission, que Guillaume et Schwitzguébel font encore partie d’une société dite l’Alliance, et alors la Commission ne sait ce qu’elle dit en prétendant que l’existence même de cette société ne lui est pas suffisamment prouvée.

Enfin le rapport prétend que cette Alliance — dont la Commission ignore si elle existe, oui ou non — avait des statuts complètement opposés à ceux de l’Internationale.

Or la vérité, que la Commission connaît parfaitement bien, est que l’Alliance a réellement existé ; que Bakounine a non seulement tenté de la fonder, mais y a réussi ; qu’elle a fonctionné au grand jour, en public, au su de tout le monde ; que le Conseil général, dans sa lettre du 20 mars 1869, a reconnu que le programme de cette Alliance ne contient rien de contraire à la tendance générale de l’Internationale (t. Ier, p. 141) ; et que le programme et le règlement de la Section qui a porté ce nom à Genève ont été approuvés par le Conseil général de Londres (lettre d’Eccarius du 28 juillet 1869[1]).

  1. Si quelqu’un voulait répondre qu’il ne s’agit pas du programme et des statuts de l’Alliance de la démocratie socialiste, société publique, mais de ceux d’une société secrète ayant porté le même nom, je ferais observer que le titre de « Statuts secrets de l’Alliance », donné aux documents publiés en 1873 dans les Pièces justificatives de la brochure L’Alliance de la démocratie socialiste, etc. (pages 118-132) a été fabriqué par les auteurs de cette brochure. Ces documents ne forment pas, comme ces auteurs le prétendent (p. 2), » une seule pièce » ; il y a là, au contraire, une juxtaposition de pièces de diverse nature, qui, à les supposer toutes authentiques, sont de valeur fort inégale. L’homme qui a le mieux étudié l’histoire, excessivement difficile et compliquée et sur laquelle la lumière ne pourra jamais être complètement faite, des sociétés secrètes, successivement ébauchées ou réalisées, dont Bakounine a été soit le fondateur, soit un membre très important, — Max Nettlau, — a écrit à ce sujet : « En fait, nous avons ici plusieurs documents distincts, des projets dont il n’est pas possible de dire s’ils ont été réalisés ; comme je l’ai fait voir ailleurs, tous ces projets étaient devenus caducs et sans objet à la suite de délibérations ultérieures. Quiconque se fût trouvé légitimement en leur possession ne pouvait pas ignorer cela. Ces papiers furent envoyés de Genève à Marx et à Engels, évidemment par Outine. Celui-ci dissimula-t-il à ses correspondants leur nullité (Wertlosigkeit) ? ou bien est-ce Marx qui, bien qu’on l’en eût instruit, la dissimula à la Commission ? » (Nettlau, p. 724.)