Page:James Guillaume - L'Internationale, I et II.djvu/94

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Dans son discours au Congrès Bakounine exposa les idées de l'Alliance.


Vient ensuite la reproduction d'un extrait assez étendu du discours de Bakounine, qui traite surtout de la question slave, de la nécessité de détruire le despotisme de l'empire russe, avec diverses considérations de politique internationale. Seul le passage suivant peut être considéré comme un « exposé des idées de l'Alliance » :


« Tout État centralisé, quelque libéral qu'il s'affirme, même s'il avait la forme républicaine, est nécessairement l'oppresseur, l'exploiteur des masses populaires ouvrières au profit de la classe privilégiée. L'armée lui est nécessaire pour conserver ces masses, et l'existence de cette force armée le pousse à la guerre. J'en déduirai que la paix internationale est impossible tant qu'on n'aura pas adopté, avec toutes ces conséquences, le principe suivant : toute nation, faible ou forte, peu nombreuse ou nombreuse, toute province ou commune, a le droit absolu d'être libre, autonome, de vivre et de se gouverner conformément à ses intérêts, à ses besoins particuliers ; et dans ce droit toutes les communes, toutes les nations sont si solidaires qu'il est impossible de le violer à l'égard de l'une d'elles sans lui faire courir le même danger dans toutes les autres. La paix générale sera impossible tant qu'existeront les États centralisés actuels ; nous devons par conséquent désirer leur dissolution pour que sur les ruines de ces unités forcées, organisées de haut en bas au moyen du despotisme et des conquêtes, puissent se développer des unités libres, organisées de bas en haut au moyen de la libre fédération des communes en province, des provinces en nation, des nations en États-Unis d'Europe. »


Après avoir parlé des incidents locaux qui troublèrent la dernière séance du Congrès de Genève, Bakounine continue, dans le chapitre dont je donne la traduction :


Le Congrès, n'ayant pas réussi à élaborer un programme, en remit la confection au comité, qui devait le présenter, au congrès annuel suivant, à la sanction de l'association. Pendant toute cette année (de septembre 1867 à septembre 1868), il y eut dans ce comité une lutte entre le libéralisme et le radicalisme bourgeois de la majorité et les idées socialistes révolutionnaires de la minorité, à laquelle appartenait Bakounine, qui avait été élu membre de ce comité ainsi que plusieurs de ses amis.

Enfin, au bout d'un an, au second Congrès de la Ligue, à Berne, la lutte de ces deux partis éclata au grand jour et aboutit à un dénouement. La différence profonde dans les principes fondamentaux des deux fractions de la Ligue d'alors trouva son expression complète dans l'attitude de la Ligue à l'égard de la question sociale...

L'outil avait été essayé ; à l'épreuve il s'était montré mauvais, il avait dû être rejeté : il ne restait qu'à en chercher un autre. L'Association internationale des travailleurs se présentait naturellement comme cet outil meilleur. Bakounine en était membre depuis le mois de juillet de cette année. Il proposa à la minorité socialiste-révolutionnaire sortie de la Ligue d'entrer en masse dans l'Internationale, tout en gardant en même temps leur lien intime, c'est-à-dire en conservant leur Alliance des révolutionnaires socialistes sous la forme d'une