Page:Jammes - Feuilles dans le vent, 1914.djvu/238

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d’avant l’orage, ce que j’appelle moi-même : c’est Dieu. Pour ressentir l’émotion d’une telle attente, comprendre à quel point les âmes sont tendues vers ce qui va arriver, il faut s’être trouvé dans ce pays où, souvent, le terrible azur se déploie comme un dais de soie bleue prête à craquer.

L’impression que l’on a c’est que, d’En haut, les invisibles éclairs de la Grâce vont frapper. Le ciel se rapproche de la terre, qui sollicite sa brusque étincelle, ainsi qu’un sommet plus près de la nue s’efforce à faire descendre la foudre. On attend Dieu. Et le voici.

Le voici. Il vient. Issu de la grotte maternelle, Il a longé le Gave comme Il longea le Jourdain, le Cédron et le lac de Génésareth. Il vient. Là-bas, loin encore, l’ombelle, comme le tournesol géant d’une Terre promise, s’incline au-dessus de l’Hostie. Il vient, Celui qui donne la paix. Il vient comme au jour où les gens de Béthanie le saluaient avec des palmes et jetaient leurs haillons sous les pas de son ânesse. Et, comme au temps de la vieille Jérusalem, voici que lent, solennel, un cri s’élève. Poussé d’abord par une seule