Page:Jammes - Feuilles dans le vent, 1914.djvu/302

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voyait… Il était allé à Tombouctou et, revenu, avait presque aussitôt prononcé des vœux… Il parlait peu, se souvient-elle, et, bien qu’il n’eût que trente ans alors, sa barbe était blanche comme la poussière des déserts qu’il avait traversés… Maintenant il était là-bas, dans l’âpreté fleurie d’une Alpe aromatique… Sans doute, rêvait-il, en s’endormant dans sa cellule, à la corne de la lune ébréchant l’ombre des sapins… Sans doute, cueillait-il à l’aube des plantes qui ont des vertus… Sans doute, priait-il pour la Pomme d’Anis… Et puis encore un oncle de son père, le grand-oncle Hubert, qui s’était voulu prêtre de campagne et qui possédait la cure de Noarrieu, à trois kilomètres du château… Dans la cour du presbytère, il y avait des pintades qui s’abritaient à l’ombre des ricins, et qui gloussaient plaintivement. Autour du puits, s’ouvraient les bouches des roses et, dans le potager, les poiriers de la Saint-Jean exhalaient, quand leurs fruits étaient mûrs, un parfum tiède, doux et triste. Sur la cheminée de la salle à manger, on voyait une vierge sous globe et, des deux côtés de la Consolatrice