Page:Jammes - Feuilles dans le vent, 1914.djvu/309

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Hélas ! Le bonheur qu’elle donnait à M. d’Anis fut court. On eût dit qu’elle avait attendu la minute précise de l’horrible accident pour accoucher et épargner à son mari le chagrin de savoir que la fleur délicieuse qui naissait d’eux naissait blessée… comme il mourait.

Tante Virginia, qui est une vieille fille qui a l’air d’un grand cheval distingué, et dont la maigreur semble tissée de longues rêveries, tante Virginia qui, à l’instar de son frère Tom, est venue vivre au château d’Anis — moins à cause de prétendus arrangements de famille qu’à cause d’une passion immodérée pour Pomme — tante Virginia récite le Benedicite. Non plus que son frère, elle ne ressemble à sa sœur Mme d’Anis.

Bonne maman d’Anis, petite, grasse et rose, et sur le nez de qui brillent toujours des lunettes, même lorsqu’elle les pense perdues, s’assied avec le sourire d’une personne sourde qui veut se montrer affable même envers ceux qu’elle n’entend pas.