Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/149

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remplacent, parmi les feuilles sèches ou la neige. Un jour elle se met à tousser beaucoup, s’étant agenouillée, par pénitence, dans l’herbe brillante de gelée. Il n’est point de mots pour raconter les tortures de cette suppliciée. Une lassitude, un écœurement de toute chose ne l’abandonnent que pour laisser place à des remords aussi cruels que peu fondés. Ces remords brûlent ses tempes, emplissent ses oreilles d’un bourdonnement continuel. Et, la nuit, des hallucinations l’épouvantent, des voix lui crient sa grossesse, des douleurs aiguës la rongent, elle voit des ombres rouges frémir dans l’obscurité.

Au réveil d’une de ces nuits terribles, Clara d’Ellébeuse n’a pas la force de se lever. Gertrude lui apporte à déjeuner. Mais l’enfant, irritée par son supplice intérieur, refuse, avec des mots de colère, les soins de la vieille servante. Mme d’Ellébeuse insiste alors doucement auprès de sa fille, pour la déterminer à prendre quelque nourriture. Mais c’est en vain, et la pauvre femme, accablée de douleur, se retire, et va pleurer longuement dans sa chambre.