Aller au contenu

Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/210

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

irritation cette simonie des âmes ? Non… La femme est née pour l’homme et l’homme pour elle. Toutes les créatures, toutes les choses veulent se donner d’elles-mêmes les unes aux autres. Considérez la vallée au printemps. Le perdreau blanc y cherche sa compagne, la fleur de l’hépatique s’incline vers la fleur de l’hépatique, l’ajonc n’a cette odeur suave que parce que ses pistils vont être alors fécondés.

… Mon enfant, je connais le supplice des cœurs solitaires, la soif d’aimer, la douleur qui gonfle de sanglots les âmes délaissées… Ma chérie, ne suffoquez pas ainsi, calmez-vous. Êtes-vous mon amie ? Je suis le vôtre et ne sais que m’attendrir sur votre cas. Votre action n’est point criminelle. Mais malheur à une société qui condamne le plus souvent une jeune fille sans fortune ou sans relations à la plus horrible des solitudes ! Ce n’est point vous qui êtes coupable, Almaïde, mais ce monde égoïste et repu de tous les vices qui refuse à une pauvre enfant ce qu’elle accorde aux animaux, ce qu’elle favorise aux oiseaux dans leurs cages. De l’hypocrisie naît tout le mal. Il faudrait que toute vierge, dont le cœur se consume isolé, ait le droit de choisir celui à qui elle veut se donner ; et que ce droit fût absolu ; et qu’il existât en dehors des conventions, des con-