Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/217

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serais tenu pour un misérable si l’idée d’un mépris quelconque pour vous avait traversé mon esprit.

Je sais également que tout triste cœur de jeune fille voué à la solitude, meurtri constamment par la vision de la joie de ses amies, gonflé par le besoin de donner son amour, de se dévouer et de se sacrifier, doit succomber à la moindre caresse qui lui affirme qu’il est capable de donner du bonheur. Et quelle est la femme heureuse qui, ayant mordu au fruit d’un riche verger, oserait blâmer Almaïde qui, au fond des ravins, cueillit une pauvre arbouse ?

M. d’Astin se tait. Il prend dans sa main la main libre d’Almaïde qui, rêveuse, penche toujours vers son enfant sa gorge de pervenche pâle d’où coule la blanche rosée de vie :

— Je sens que vous parlez selon Dieu. Mais qui donc parle encore comme vous ?

Elle relève la tête, attendant la réponse qui ne vient pas.

M. le marquis d’Astin s’est endormi dans la Paix éternelle.


fin d’almaïde d’etremont