Aller au contenu

Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/260

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


LE CHEMIN DE LA VIE


Un poète s’assit un jour à une table pour écrire un conte. Aucune idée ne lui venait, mais il était joyeux, parce que le soleil éclairait un géranium sur la croisée, et qu’au milieu de la croisée, ouverte et bleue, une mouche volait.

Tout à coup, sa vie lui apparut. Elle était une grande route blanche qui, partie d’un bosquet noir où riaient des eaux, aboutissait à une petite tombe calme envahie de ronces, d’orties et de saponaires.

Dans le bosquet noir, il reconnut l’ange gardien de son enfance. Il avait des ailes dorées comme une guêpe, des cheveux blonds et une figure calme comme l’eau d’une citerne un jour d’été.

L’ange gardien dit au poète :

— Te souviens-tu de quand tu étais petit ? Tu venais ici avec ton père et ta mère qui pêchaient à la ligne. La prairie, non loin, était chaude et pleine de jolies fleurs et de sauterelles. Les sau-