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NOTES


Donc, me voici de retour en ce vieux salon où je considère avec attendrissement le moindre objet. Ce châle fut à ma grand’mère paternelle que je n’ai point connue et qui repose dans un humble cimetière des Antilles en fleurs. Puissent les colibris étinceler et crier sur sa tombe abandonnée, et les tabacs aux cloches roses plaire à sa mémoire… Je n’ai point vu de portrait qui la représente. Mais je sais qu’elle avait une réputation de bonté et de beauté. J’ai lu d’admirables lettres d’elle écrites de là-bas à mon père enfant que l’on avait amené en France pour s’y instruire et qui y est demeuré.

Combien j’ai rêvé parfois de ressusciter ce passé. Combien il serait beau que Dieu nous donnât, une fois par an, cette fête de voir revenir de chers disparus ! J’aime à me figurer que ce serait le jour des Rois, et par un temps de neige. La pauvre salle à manger s’ouvrirait aux coups de huit heures et je retrouverais là, assis à la table agrandie et ornée de roses de Noël, sous la claire gaîté de la lampe, tous ceux dont mon âme a le deuil.

Il me semble que ce revoir serait si naturel,