Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/78

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sées impures au sujet du grand-oncle Joachim et de sa fiancée Laure. Je me suis demandé si elle s’asseyait sur ses genoux quand ils étaient fiancés…

Et cette peur du péché, torture que peut seule comprendre une âme catholique, bouleverse en ce moment l’âme douce de Clara. Elle arrive au bout du verger et, près de la tonnelle, elle ouvre la barrière verte et gagne la partie la plus ombreuse du parc. Là sont des vernis du Japon, des lauriers, de faux-pistachiers, des liquidambars et des érables. Sous la voûte de feuillages règne une espèce de nuit, même lorsque la canicule pose une lumière de silence aux cimes luisantes des arbres.

Bientôt la jeune fille quitte le parc, et franchit la grille où des initiales des d’Ellébeuse, dans une ferronnerie ovale, s’encadrent de fleurs de lys rouillées. Et, quittant le domaine, elle se trouve sur le chemin craquelé par la chaleur, entre les fougères des talus. Un bec choque une écorce, un lézard se glisse, une cigale se tait.

Ce chemin conduit à la chapelle ancienne et pauvre. Pour s’y rendre, Clara traverse le cimetière où sont des tertres ornés de yuccas, d’œillets, de buis, de violiers, de menthes poussiéreuses, et de ces plantes que l’on appelle cabarets-des-oiseaux à cause de leurs feuilles creuses où séjourne de l’eau.