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II


Toc, toc-toc, toc : Je vous apporte
Du lin ; grand’mère, ouvrez la porte ?

c’est la bergère du ruisseau
Avec sa quenouille en roseau.

Sur le vieux perron qui s’effrite
La mère-grand paraît bien vite.

Elle dit : Comme t’as couru
Ô petiote ! le long du ru.

Toc, toc, toc. C’est le rouet rauque
Achevant sa chanson baroque.

Tout à-coup, par enchantement,
Disparaît la bonne maman.

La bergère voit à sa place
Le beau cavalier de la chasse.

Elle est rose et dans l’embarras,
Mais lui la prend vite entre ses bras.

La quenouille blanche et légère,
Tombe aux pieds nus de la bergère.

Toc, toc, toc. C’est son petit cœur
Sur le pourpoint de son vainqueur.

Il l’aima bien deux cents journées
Jusqu’au temps des feuilles fanées.