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Page:Jan - Dans la bruyère, 1891.djvu/100

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DANS LA BRUYÈRE


Mais le poète peut exprimer ce qu’il sent ;
Il déroba, dit-on, le langage des anges.
Et moi, rêveur trahi, je demeure impuissant
Devant des ailes d’or et des beautés étranges.

On conte qu’autrefois de pieux voyageurs,
Le bourdon à la main, passaient dans le village,
Et, parmi les blés mûrs et les grands bœufs songeurs,
Ils trouvaient un enfant lisant sous le feuillage.

Alors, ils l’emmenaient dans les doctes couvents,
Lui donnant comme un pain céleste la science ;
Et l’enfant, devenu grand parmi les vivants,
Ouvrait un ciel plus vaste à la pensée immense.

Et moi, je reste seul ! Jamais je ne saurai
La langue harmonieuse et pure du poète ;
Allons, mes bœufs, debout ! — Mais je t’adorerai,
Ô divine Beauté, dans mon âme muette.