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Page:Jan - Dans la bruyère, 1891.djvu/36

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DANS LA BRUYÈRE


« Je m’ennuie en ces lieux. J’ai peur : mon front pâlit !
Comment peut-on s’aimer sous ces voûtes moroses ?
Rentrons. Dans le jardin nous cueillerons des roses :
Tu les effeuilleras pour parfumer mon lit. »

Je l’écoutais parler, pris d’une angoisse amère.
En mon cœur s’écroulait le Rève épouvanté ;
Et, comprenant soudain sa trompeuse Beauté,
Je cherchais dans sa voix un lambeau de chimère.

Tout ce que j’avais mis d’infini dans ses yeux,
Tout ce que j’avais mis d’idéal dans son âme,
S’enfuyait brusquement à cette voix de femme
Parlant d’un ton léger du mystère des cieux.

Et je sentis combien l’illusion est brève…
— Elle avait, en sa fleur, un bel air nonchalant,
Et, sous les blonds cheveux qui doraient son col blanc,
Un cerveau trop étroit pour porter un grand rève.