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DANS LA BRUYÈRE


Ses bœufs ont l’air éteint des animaux stupides.
Sans soupçonner encor la fête du matin,
Ils ouvrent par moment leurs narines avides
Pour humer dans le ciel un arôme lointain.

Quand ils font une halte après un travail rude,
Leurs yeux roulent plus vite, hébétés de sommeil ;
Et, s’arrachant soudain à leur morne attitude,
Ils beuglent lentement du côté du soleil.

Mais lui, le dur bouvier, il regarde la terre :
Enfant, il a grandi sur son sein colossal ;
Et sans rien entrevoir de son profond mystère,
À l’horizon des blés il borne l’idéal.

Eh bien ! il l’aime ! il l’aime avec l’ardeur d’un mâle,
Cette terre féconde et trompeuse parfois,
Sans plus s’inquiéter de l’aube rose ou pâle,
Des parfums de la fleur et des frissons des bois.