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Page:Jan - Dans la bruyère, 1891.djvu/98

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DANS LA BRUYÈRE


Oh ! la charrue est lourde ! et je veux un moment
M’asseoir sur le talus fleuri, pour mieux entendre
Mes amis les bergers qui s’en vont lentement,
Égrenant leur chanson mélancolique et tendre.

Oui, la charrue est lourde ! oh ! qu’il fait bon s’asseoir !
J’aperçois le landier où ma douce Marie
A mené ses moutons, et la sente où ce soir
Nous cueillerons tous deux la bruyère fleurie.

— Oh ! diront-ils, voyez les rèveurs amoureux !
Mais les gens du village ont l’humeur peu subtile :
Certes, on peut songer sans être un songe-creux,
Et le rêve qui rend plus heureux est utile.

Moi, d’ailleurs, j’aime à voir la splendeur du soleil :
Sans comprendre jamais j’ai senti quelque chose
Dans l’aube blanchissante et le couchant vermeil ;
Quelque part, à mon âme émue, une voix cause.