Page:Janet - Les névroses, 1909.djvu/273

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diffuses. Au milieu de toutes ces misères, se présenta de temps en temps, assez rarement au début, un autre phénomène très bizarre. Elle paraissait tomber en syncope pendant quelques minutes à peine, c’est la transition que nous avons déjà remarquée à propos de la plupart des somnambulismes; puis elle se réveillait subitement, elle était gaie, active, remuante sans aucune inquiétude et sans aucune douleur. Elle n’avait plus ces sensations pénibles et ces insensibilités qui la gênaient précédemment, elle était beaucoup mieux portante que dans la période précédente. Mais, remarquons-le tout de suite, dans cet état en apparence nouveau, elle ne présentait en aucune manière le trouble caractéristique de Mary Reynolds; elle n’avait pas à rapprendre quelque chose, parce qu’elle n’avait rien oublié. Elle conservait un souvenir très exact de toutes sa vie antérieure, de toutes les souffrances qu’elle avait subies et de tout ce qu’elle avait appris antérieurement. Tout était donc pour le mieux, mais cet état de bien-être durait peu; au bout d’une heure ou de trois heures, elle avait une nouvelle syncope et se réveillait alors dans l’état antérieur considéré comme normal que nous pouvons appeler, en suivant la convention d’Azam, l’état prime. En revenant à cet état, elle retrouvait toutes ses infirmités, ainsi que son caractère lent et triste auquel on était accoutumé. Mais il y avait maintenant un phénomène de plus, elle avait complètement oublié les quelques heures précédentes, remplies par l’état II ou l’état vif : toute cette période était pour elle comme si elle n’existait pas.

Cela n’avait pas à cette époque grand inconvénient, puisque l’état appelé II ne surmenait que de temps en temps et qu’il durait une heure ou deux. Mais, peu à peu, cet état prit un singulier développement; il se prolongea pendant des heures et des jours, et comme le sujet était alors beaucoup plus actif, il se remplit