Page:Janet - Les névroses, 1909.djvu/48

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impulsions, il a des actions. Nous avons vu qu’il joue son rêve; il va quelquefois jusqu’au crime, et s’il ne réussit pas plus souvent, c’est à cause de sa maladresse et de son défaut de perception de la réalité. Est-ce que le malade impulsif cède de la même manière à ses impulsions? Il le prétend, il a une peur affreuse d’être entraîné à commettre un homicide, il demande en suppliant qu’on le protège contre lui-même, il vous montre même de petits mouvements qu’il appelle des commencements d’exécution. Mais c’est tout : en fait il n’exécute jamais rien, au moins dans la grande majorité des cas. Je faisait remarquer autrefois que, sur trois cents malades de ce genre observés pendant une douzaine d’années, je n’avais constaté aucun accident réel. Je crois aujourd’hui qu’il y a dans cette affirmation quelques difficultés et que dans un certain nombre de cas il faut diagnostiquer avec soin l’état du malade. Certaines exécutions de l’idée obsédante peuvent survenir quand il s’agit de malades dont l’état mental est transformé par des intoxications, comme les alcooliques et les morphinomanes. Certains malades, d’autre part, se trompent; ils considèrent l’acte comme peu important, peu dangereux; ils se figurent ne faire qu’un geste, qu’un début de l’action, et, sans s’en douter, ils font des choses beaucoup plus graves qu’ils ne le supposaient. Je songe en particulier aux jeunes filles qui refusent de manger, qui s’imposent des régimes absurdes, de peur leur poitrine ne se développe ou que leur nez ne rougisse. D’autres enfin sont plus avancés dans la maladie : ils ont dépassé l’obsession et arrivent à un véritable délire. L’évolution de l’obses-sion vers les délires plus ou moins systématiques est plus fréquente qu’on ne le croyait. Ces derniers malades deviennent dangereux et peuvent exécuter des idées qui, pendant des années, étaient restées de simples impulsions sans conséquence. En