Page:Janet - Les névroses, 1909.djvu/50

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Un dernier problème résume tous les précédents : le sujet croit-il à son obsession? Se croit-il réellement sacrilège, criminel, phtisique ou syphilitique? Quand il s’agit de l’hystérique qui délire, nous n’avons pas de doute; la malade qui se couche par terre en attendant que le train passe et qui se croit écrasée par la locomotive, pousse de tels cris d’horreur, a de telles expressions de physionomie, s’évanouit si réellement, que nous ne doutons pas qu’à ce moment même elle n’ait la conviction. Il n’en est plus du tout de même avec le psychasténique : on ne sait jamais ce qu’il pense; il pleure pendant des heures en disant qu’il a volé au moment de rendre la monnaie, et il ne consent pas à ce qu’on aille reporter l’argent; il se dit syphilitique et s’en désespère, et il refuse le traitement. En réalité, il doute énormément de son idée, et c’est ce doute qui vient remplacer les caractères négatifs de l’incon-science et de l’amnésie.

Comme ce caractère est très remarquable, nous lui consacrerons une étude spéciale. Pour le moment, nous pouvons dire en résumé que l’obsession des psychasténiques ne se développe pas complètement, comme celle de l’hystérique, et qu’elle n’est pas non plus, comme celle-ci, en dehors de la conscience et de la mémoire. Elle a un certain développement imparfait; elle ne donne pas au malade l’impression nette d’une idée qui lui appartient; elle semble s’imposer à lui; elle manque de précision, de certitude, de liberté. C’est un trouble à la fois plus général et moins complet. J’ai insisté sur ces deux premiers phénomènes : l’idée fixe et l’obsession, et sur leur comparaison, parce que ce sont des phénomènes névropathiques très importants qui caractérisent deux états d’esprit différents. Nous retrouverons plus aisément les mêmes caractères et les mêmes oppositions dans les autres troubles névropathiques qui seront maintenant plus aisés à comprendre.